La théorie du tabouret


"Donnez-moi un point d'appui, et je vous soulèverai le monde"
(Archimède)

« Rien ne sert de pousser fort sur le piano pour le déplacer, si l’on n’est assis sur un tabouret à roulettes », c'est ce constat qui est à l'origine de la théorie du tabouret. Une image qui exprime que pour faire bouger le monde qui nous entoure, nos intentions doivent trouver, dans notre propre mental, une bonne assise. Faute de quoi nous ne serons jamais qu’un relais des intentions des autres, et nous risquons de subir notre environnement plutôt que de le façonner à notre idée.

Qu’est-ce que le tabouret vient faire là dedans, outre le fait que l’objet a toute chance d’être connu par la majorité des lecteurs potentiels de ce texte ? Il y a trois bonnes raisons de faire appel à ce symbole :

1. Il faut au moins trois pieds (non alignés) pour prétendre assurer une stabilité.

2. Il suffit qu’un des pieds soit trop fragile pour entraîner la chute. Certes, ça fait rire tout le monde et Bergman en particulier, mais pas l’intéressé.

3. Difficile de dormir sur un tabouret : pas de vigilance et on peut sombrer sans s’en rendre compte. Tel Sisyphe et son caillou : si on se croit arrivé, autant dire qu’on est revenu au départ.

Sur un plan pratique : la proposition de l’outil est d’identifier trois éléments dont un seul fragilisé peut écrouler notre assise intérieure, et mettre en péril l’expression et la réalisation de nos intentions. Ces trois éléments sont : Responsabilité, Intégrité et Autonomie mentale.

Pied N°1 : La responsabilité

La responsabilité est définie ici comme la capacité à considérer toute situation comme résultant de ce que l’on a dit et fait (ou omis de dire ou faire), et de ne jamais considérer que le changement viendra de l’extérieur. Autrement dit, qu’une situation est le résultat de ses choix et ne persiste que si on l’accepte. Il ne s’agit pas de philosopher sur la place du hasard dans la réalité, nombreux étant ceux qui l’on déjà fait avec talent. Restons sur un plan strictement d’efficacité : être responsable signifiera pour nous de ne pas subir les situations, en gardant la juste conscience de sa liberté de choix.

C’est un point de vue qui n’est pas trop difficile à adopter dans le cadre d’un plan d’action, mais dont on décroche dès qu’il s’agit de sujets plus graves comme une situation sociale ou économique, pire encore, de santé. Pourtant, plus on peut développer cette aptitude, dans tous les domaines, plus elle marque une capacité à agir plutôt qu’à subir, à entreprendre plutôt qu’à se plaindre, et assure ainsi une concentration de son énergie sur des issues positives.

Pied N° 2 : L'intégrité

Nous définirons ici l'intégrité personnelle comme une cohérence entre l’être, la pensée, les communications et les actions. Une cohérence totale entre ce que l'on est, ce que l'on pense, ce que l'on communique et ce que l'on fait. Une transparence parfaite, que l'on appelle souvent l'authenticité.

Nous avons été marqués par une civilisation dans laquelle dire ce que l'on pensait pouvait valoir de sérieuses réprimandes. Quant à faire ce que l'on voulait, ce n'était pas forcément l'apanage d'une "bonne éducation".

Les enfants ont peut-être plus de liberté aujourd'hui, mais dans le fond peu de choses ont changé. Nous sommes jugés par l'entourage sur ce que nous montrons. On s'en préoccupe par un tout naturel souci de sécurité ou d’image, mais on ne se méfie pas toujours que c’est au détriment du jugement que nous portons sur nous-même. C’est pourtant le premier qui devrait être pris en compte, car on est sûr de se retrouver face à soi un jour ou l'autre. Ce que beaucoup appellent « pouvoir se regarder en face dans une glace ».

Plus grave encore, nous avons pris l'habitude de rechercher des coupables, ne fut-ce que pour se dédouaner, et il n'est pas souhaitable de se retrouver dans la peau de celui qui assume, tel le personnage "La Gloïre" de Boris Vian, le rôle d'expiateur. Nous ne sommes donc pas pressés de dire la vérité, par souci d'efficacité, lorsque avouer peut dégrader notre image.

Plus pernicieuses encore sont les valeurs imposées qui créent le « sens du devoir » contraint, qui part pourtant d'un bon sentiment. Faire "ce que l'on doit faire" contre sa conviction profonde peut être sain sur un plan collectif et social, mais peut ébranler notre assise personnelle.

Ceci est d'autant plus persistant que nous sommes dotés d'un outil mental qui nous rend d'une totale cécité sur ce que notre fort intérieur nous conseille de ne pas voir. Nos processus inconscients sont, dans ce domaine, nos pires ennemis, notamment ce besoin incoercible, si bien développé par Arthur Koestler (Janus - voir bibliographie), de nous aféoder à des propositions à caractère dogmatiques. Le besoin de croire l'emporte souvent sur le besoin de liberté, nous rappelle Comte-Sponville.

Pied N° 3 : L’autonomie mentale

L’homme est un loup pour l’homme, à en croire Jean-Jacques Rousseau, ce que suffit à rappeler une rapide observation du comportement de certains automobilistes. Mais il a également besoin de l’homme. Ce besoin est inscrit dans nos gênes au point que nous cherchons à évacuer une grande partie de nos incertitudes et de nos peurs en faisant partager nos opinions, adopter nos valeurs ou approuver nos comportements. C’est une attitude qui nous prive de la liberté d’esprit nécessaire à la mise en oeuvre de nos intentions.

Pour une bonne assise, il faut s’affranchir un minimum de la pression des autres, ou du besoin de leur approbation. C’est ce que nous appellerons l’autonomie mentale.

En résumé :


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En conclusion :

Rien de ce que vous pourrez travailler sur votre efficacité personnelle ne sera donc vraiment efficace si cette assise est branlante. Ce sera le cas dès que l'un de ces pieds est trop faible. Lorsque les choses vous paraissent difficiles, il vaut mieux commencer par vérifier la solidité de son tabouret.

C’est ce que propose la technique TRIPÔLE. Mais attention : on touche là à des paramètres dont l’amélioration est l’effort, mais le plaisir, de toute une vie.